samedi 2 mars 2019

Arrêtez-ça

Rosy R.

Mais j’avais certainement tout faux quant à ma ridicule façon, peu élégante, d’avoir abandonné Rosy qui était venue me rejoindre, à mon grand étonnement, en Guadeloupe.  Deux jours auparavant, fin août 1988, nous étions encore à Paris. Hélène, dont j’étais séparé depuis presque une année, est sans doute encore trop présente dans mon cœur.  Aussi, comme ce fut le cas avec Louisa, ma petite Anglaise, que je laisserai sur le quai à Brighton quelques mois plus tôt, avec comme excuse de vouloir retourner en Belgique auprès de la mère de mes enfants, j’avais décidé de rompre ma relation avec Rosy, pourtant si belle, si proche en tant que sociologue de mes idées, si authentique …Qui s’était engagée à fond… Six enfants espérait-elle avec moi (qui n’était même pas encore divorcé) ; et son annonce au mariage juif de son frère à Toulouse du nôtre parmi les nombreux   invités qui nous applaudiront à l’unanimité.  Et moi, le futur goy vis-à-vis de cette communauté, cette grande famille qui m’avait ouvert les bras, j’agirai comme un traître et la conduirai à l’aéroport d’Orly pour qu’elle rejoigne un autre frère à Nice et qu’elle souffre moins de notre rupture.  Je lui demanderai tout de même, avant qu’elle ne s’embarque,
 « - Pourquoi veux-tu rester avec moi ? – Parce que tu as écrit Halabjã », me répondit-elle.


Je me doutais bien que ce n'était pas la seule raison, plutôt une façon de ne pas perdre la face; mais je ne la contredirai pas. Il y avait aussi, en plus du bateau, ce charmant pavillon entouré de verdure à Le Peck avec son petit étang et ma nouvelle jaguar décapotable qu’elle adorait conduire.  Avouons que ça aide un peu.  C’est vrai aussi,  je n’étais pas encore un vieux sénile.

Les deux jours plus tard, à peine avais-je posé les pieds sur le tarmac brûlant de Raizet (l’aéroport de Pointe-à-Pitre), que Jean-Lou venu m’accueillir, m’annonce que Rosy est ici depuis hier.
Le temps de louer une voiture et j’irai la rejoindre à l’hôtel près d’une plage à quelques kilomètres de la Marina-Bas du Fort.  Heureuse de me revoir, nous irons passer l’après-midi sur la plage, nous baigner, puis avec la frénésie, attisés par l’émotion de nous être retrouvés, …Je succombai à ce merveilleux corps de cette Juive-Parisienne-intellectuelle aimante de vingt-neuf ans. 

Le Spirit of Sindbad est amarré dans la marina (dixit mis à l’eau depuis le six juin dernier, le jour de mes quarante-six ans – pratiquement prêt pour le grand départ).  En fin de cette de journée romantique, Jean-Lou et Céline,  sa nouvelle compagne,  ayant préparé un barbecue sur le quai face au bateau, Rosy et moi y reviendrons pour partager ces agapes prometteuses de plaisirs et d’entretiens en discussions joyeuses pour nos projets à la conquête des mers lointaines.  Brusquement, sans que je sache pourquoi, entre Rosy et Jean-Lou la conversation dégénère…et le Suisse menacera la Parisienne d’interdit de monter sur le bateau.  Et moi, la honte, le faible, le manipulé par ce baroudeur, je n’interviendrai pas pour remettre les aiguilles à l’heure en rappelant qu’ici, c’est à moi de décider qui va ou non à bord.  Rosy disparut et plus jamais je ne l’ai revue.  


Oui, ici, j’avais une fois de plus tout faux.  Pardon Rosy!. 


Halabjã

Avec la précieuse collaboration  de Francis Goya pour les arrangements

cliquer ici pour écouter cette chanson

Halabjã, Halabjã !
Entends-tu l’ami ce cri de là-bas ?
De l’au-delà, cinq mille voix
Qui crient très fort : arrêtez ça
Combien de morts faut-il encore
Pour arrêter cette violence ?
Combien de morts faut-il encore
Pour arrêter ces expériences ?

Halabjã, Halabjã
Entends-tu l’ami ce cri de là-bas ?
Mais toi cet autre qu’as-tu fait là ?
Ce que tu tues, c’est toi qui meurs
Mais toi cet autre qui crois sans voir
Replonge-toi dans ta mémoire
Revois l’Histoire, y a pas d’erreur
Il y a bien eu Hiroshima

Halabjã, Halabjã
Entends-tu l’ami ce cri de là-bas ?
Mais toi cet autre te souviens-tu
De ces « Hitler » brûlant la terre
Les survivants qui en restèrent
Plus forts encore, les dominèrent
De ces ghettos, sûrs d’une mission
Des fils nouveaux firent une nation

Halabjã, Halabjã
Entends-tu l’ami ce cri de là-bas ?
Mais toi cet autre qui joues Staline
Te souviens-tu de ce Katine
Combien de bourreaux a-t-il fallu
Pour tirer dans dix-mille nuques
Combien de temps a-t-il fallu
Pour rappeler ces disparus ?


Halabjã, Halabjã
Entends-tu l’ami ce cri de là-bas ?

Ô Halabjã relève-toi
De tes souffrances pas de passion
Du génocide pas de vengeance
Montre à ces monstres l'indifférence 
De l'au-delà des millions de voix
Qui crient très fort
Arrêtez-ça 

PR :
« Nous étions fin mars 1988 !

À la gare de l’Est à Paris,  au moment où j’allais monter dans le premier train pour Bruxelles,   sur les quais des hommes de type oriental crient : Halabjã, en distribuant des tracs.  Halabjã,  je l’apprenais,  était une ville kurde en Irak,  près de la frontière iranienne.  L’opposition de sa population à la politique guerrière contre l’Iran accrut la colère d’un Saddam Hussein qui ordonna,  en guise de représailles,  le tir des fameuses bombes à gaz moutarde sur cette cité qui entraîna la mort de tous ses habitants le jour même.  Si j’ai écrit cette chanson,  c’est parce que ce drame n’apparût pas clairement aux infos chez nous les Occidentaux.  Normal,  à l’époque Saddam faisait partie des Alliés contre l’Iran,  l’ennemi juré des Américains ;  nous les Européens  suivions le mouvement par notre silence. 

Et voilà,  trente ans après,  en Syrie,  oui les atrocités des guerres se suivent et se ressemblent!  Enfin,  cette fois nous réagissons !   Mais plutôt que des missiles,  n’y a-t-il pas d’autres moyens ?

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